Toutes les mercredis entre 13h et 13h30 sur Radio Phénix, dans l’émission La Méridienne, votre serviteur parle science le temps d’une chronique. La première portait sur Néandertal. Voici le texte originel, et le podcast (devrais-je dire « baladodiffusion » ?) de l’émission ici même. La chronique commence à 23’09. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas écouter Raphaël avant !
La Méridienne compte désormais un nouveau chroniqueur. Bonjour Janlou.
Bonjour Raphaël, bonjour à tous.
Et avec toi, nous allons parler science, et je crois qu’aujourd’hui, tu comptes nous faire voyager dans le passé.
Oui, exactement. Nous allons remonter le temps et plonger non pas dans l’histoire, mais dans la préhistoire humaine puisque je vais vous parler d’une petite révolution scientifique en cours depuis ces derniers mois concernant la disparition d’un de nos plus proches cousins… l’Homme de Néandertal.
Alors pour replacer les choses dans leur contexte, je vous propose d’abord de partir en 1856 dans la vallée de Néander, en Allemagne, puisque c’est là qu’on y découvre un squelette humain aux allures étranges. Pas vraiment comme nous mais malgré tout très proche. Qui était-il ? On a d’abord cru qu’il s’agissait d’un infirme au visage déformé. Mais les analyses ultérieures se sont montrées plus formelles. Il s’agissait d’une nouvelle espèce humaine dont il nous restait tout à apprendre.
Et aujourd’hui alors, 160 ans après cette découverte, que sait-on de l’Homme de Néandertal ?
Déjà, on sait qu’on s’est longtemps trompé à son sujet. Ses particularités physiques, notamment au niveau du visage, avec des arcades sourcilières particulièrement prononcées et une absence de menton par exemple, a longtemps été raillé par les spécialistes, qui l’ont pensé un peu débile et donc beaucoup moins intelligent que ne l’étaient nos ancêtres sapiens, qui eux, évidemment, avaient toutes les qualités du monde. Pourtant, les études récentes tendent à montrer qu’il nous était presque égal, en technologie et en pensée abstraite. Car oui, il taillait lui aussi ses outils dans les os de rennes et ne se servait pas que des pierres, lui aussi fabriquait des parures, lui aussi enterrait ses défunts, et lui aussi semblait posséder une forme d’art, comme le montrent des gravures dans une grotte de Gibraltar. Preuve de sa capacité à survivre : il a colonisé l’Europe et l’Asie occidentale durant plus de 200.000 ans.
Oui mais justement, les dates et les causes de sa disparition font toujours l’objet de débats…
Tout à fait. Evoquons d’abord le débat concernant son déclin. Avec l’avènement de nouvelles techniques de datation, les scientifiques ont d’abord estimé que nos proches cousins, dont nous possédons pour une grande partie d’entre nous 2 % de leur ADN, ont trépassé il y a environ 30.000 ans. Le chiffre reste imprécis car il n’a pas disparu partout de tout son territoire en même temps. Et, étrangement, son déclin semble coïncider avec l’apparition un peu plus tôt d’une nouvelle espèce humaine dans la région : Homo sapiens. Des gens comme nous en fait, nos ancêtres venus du Moyen-Orient et allant voir vers l’ouest si l’herbe était plus verte il y a 45.000 ans.
Aïe. Et la cohabitation ne se serait pas bien passée alors ?
C’est en tout cas une hypothèse émise par certains. Nos velléités belliqueuses nous auraient poussés à commettre ce qui pourrait être le premier génocide de l’histoire. Mais aucun indice archéologique ne permet de valider ce scénario.
Alors d’autres théories ont été évoquées. La compétition pour les ressources par exemple. Les Néandertaliens n’auraient pas supporté qu’on leur pique leur nourriture et, incapables de s’adapter, seraient morts de faim. Mais là encore ce serait notre faute, indirectement et puis c’est toujours une façon de nous faire croire qu’ils étaient idiots.
Mais les études récentes pourraient nous exempter de tout soupçon ?
Oui, plus ou moins. Car au fil des millénaires, des impuretés viennent se déposer sur les os fossilisés et faussent les calculs obtenus par la datation au carbone 14. Avec des méthodes plus récentes de purification du matériel scientifique, les chercheurs ont obtenu des dates très différentes. Comme je le disais, on a longtemps pensé que les derniers Néandertaliens s’étaient éteints il y a moins de 30.000 ans en Espagne. Or, des données publiées en septembre évoquent plutôt la date de 40.000 ans sur la péninsule ibérique. Et une nouvelle étude, tout juste parue le Journal of Human Evolution mise elle sur une extinction dans cette région du monde il y a 43.000 ans, alors que les Homo sapiens n’avaient pas encore posé le pied dans cette partie de l’Europe. On en conclut donc qu’au moins une partie des Néandertaliens sont morts tout seuls, dans leur coin, sans l’aide de nos ancêtres. En d’autres régions du Vieux continent, il y a possiblement eu des rencontres mais déjà, avant qu’elles ne se produisent, l’Homme de Néandertal était sur le déclin.
Alors, connaît-on les causes réelles de sa disparition ?
Non. Toujours pas. Et elles seront difficiles à déterminer. Peut-être vivaient-ils sur des territoires trop grands et ainsi les différents clans étaient trop éloignés les uns des autres pour se rencontrer. Ca finissait par former des tribus de moins en moins nombreuses, avec de plus en plus de difficultés pour se reproduire. Jusqu’à leur disparition…
L’une des théories probablement les plus farfelues suggère que ces hommes préhistoriques ont trépassé parce qu’ils ne savaient pas chasser le lapin, alors que ces animaux pullulaient tandis que les grands mammifères, proies habituelles des Néandertaliens, disparaissaient… Mais cette drôle d’histoire tombe aussi à l’eau car ce scénario se serait produit il y a 30.000 ans, alors que Néandertal n’était plus depuis bien longtemps.
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